LE MUR
C’était au pied du mur le salpêtre.. Il avait eu des années pour se former,
ces années où le villageois était parti contraint et contrit, guerroyer.
C’est à ce même mur, en son ombre en son pli,
que les trois déserteurs avaient trouvé abri,
dormant contre le mur chaud et assaini
des feux qu’ils allumaient à la tombée de la nuit
Vint la fin de la guerre, le retour du villageois suivi de près par celui de la maréchaussée.
Les trois déserteurs durent à regret ce havre quitter
Le villageois, parvenant de retour de guerre, exténué, au pied de son mur crut que la chaleur qui le berça cette nuit là venait des bienfaits de la bénédiction du vieux curé qui, dans le village resté caché, avait sans doute aussi le salpêtre exorcisé.
Les pierres ont pourtant une mémoire.. Et si au matin elles se sont remises à suinter,
Qui sait si ce n’est du chagrin que les trois déserteurs aient encore du déserter.