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poésie cursive
28 janvier 2010

La Lisière

Il habite au bord de la Terre dans un endroit un peu particulier

C’est un désert longé par un fleuve que l’on ne peut pénétrer  depuis cette rive, l’eau y est opaque, ce n’est pas de l’eau mais un fluide épais, opalescent,  qui engloutit  à jamais tout végétal, animal ou humain qui s’y aventure

Sur l’autre rive, luxuriant, pacifique, c’est le pays d’Antan ! Où les dieux, les poètes et les héros se retrouvent après avoir accompli leurs missions terrestres.

Ce n’est pas souvent qu’il avait de la visite

Les gens ne sont plus curieux …

Pourtant un jour, à la nuit tombante, sur cette rive aride, depuis son dôme véranda, il vit s’avancer vers son home climatisé une sorte de Monsieur Picwick, tout rouge, essoufflé et ébouriffé sous son chapeau rond

Le nez écrasé contre la vitre, yeux écarquillés, il semblait fasciné par l’eau turquoise du bassin de la verrière. Peut-être prenait-il son domicile pour un établissement balnéaire..

Le petit homme replet se mit à s’égosiller :

« s’il vous plait, c’est ouvert ? Ouvrez moi ! Je suis dans le désert, je suis dans le désert ! »

Par l’interphone, une voix de stentor retentit :

« Moi aussi je suis dans le désert ! Ce n’est pas pour ça que je crie aussi fort ! »

S’épongeant le front de son grand mouchoir à carreaux, le petit personnage suppliait :

« Je vous en prie indiquez-moi la sortie du désert »

« Il n’y a pas de sortie, que le Fleuve  lui fut il répondu haut et clair

« Je veux le traverser,  je veux rejoindre l’autre rive »

« Impossible c’est le pays d’Antan, seuls les dieux, héros ou poètes peuvent y séjourner, êtes-vous un dieu ? »

« Mais non !» le petit homme rondouillard frisait l’apoplexie

« Êtes-vous un poète ? » poursuivait t’on sans complaisance

« Non plus » geignit-il

« Alors, il ne vous reste plus qu’à devenir un héros. Regardez la lune se mirer dans ce côté ci du fleuve, plongez, allez la décrocher ! »

« Sornettes et billevesées ! La lune ne réside pas dans l’eau mais dans le ciel » s’indignait le visiteur

«  Vous êtes ici au bord de la Terre, fusion dispersion, eau et air s’épousent, comprenez vous ? Vous êtes parvenu à ce que l’on appelle l’Impossible, croyez en lui et ce sera la seule obole que je vous demanderai »

Le petit homme s’assit sur une grosse pierre dans le sable, retira son chapeau et se mit à réfléchir.

Le soleil, dardant ses derniers feux sur la porte du dôme, faisait luire les lettres gravées dans la belle plaque en cuivre :

Monsieur CHARON

Passeur

D

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